L'article d'aujourd'hui va nous faire voyager en Wallonie, une région d'origine de mes ancêtres découverte il y a peu : jusqu'en 2023, personne ne savait encore que ma mère avait eu des ascendants wallons.
Vue de Silenrieux en Cerfontaine, province de Namur (Belgique).
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En remontant le temps, j'avais fini par découvrir l'existence de mes ancêtres d'Artois, province devenue après la Révolution partie du Pas-de-Calais (surtout) et du Nord (un peu, en limite de Douai).
Ainsi, Adolphe MASTIN (mon Sosa n°30), le père de mon arrière-grand-mère brestoise Héloïse MASTIN, est mort à Lambézellec près de Brest en 1919 dans sa maison de Kerfautras, mais il était né en 1839 à Lambres-lez-Douai.
C'est son choix pour la Marine Nationale qui l'a conduit à traverser la France de Douai à Brest, comme je l'ai indiqué dans un article récent (voir).
C'est ainsi que je me suis découvert il y a peu des ancêtres chtimis, absents de la mémoire familiale bien que ma mère ait évoqué il y a fort longtemps et sans plus de précisions l'existence probable d'ancêtres peut-être "flamands".
Ces ancêtres d'Artois et de Flandre habitent alors les paroisses puis communes de Lambres-lez-Douai, Esquerchin, Cuincy, Courrières et Hénin-Liétard (devenue Hénin-Beaumont après sa fusion avec la commune voisine de Beaumont).
En poursuivant la remontée du temps, on découvre que certains de ces gens du Nord sont originaires, avant la Révolution, de localités situées aujourd'hui en Belgique (Etat qui n'existe pas avant 1830), dans les Pays-Bas espagnols de l'époque (Tournai, Helkijn, Kaïn) ainsi que dans les territoires des Ardennes et du Hainaut : Villers-Deux-Eglises et Silenrieux qui vont nous retenir un peu.
Ces deux dernières paroisses, devenues communes après la Révolution française et leur annexion par la France, n'existent plus aujourd'hui en tant que telles : elles ont fusionné avec d'autres pour constituer l'entité appelée aujourd'hui Cerfontaine, située en Belgique au pied du massif des Ardennes.
Silenrieux et Villers-Deux-Eglises, deux paroisses wallonnes de la province de Namur
proches de l'actuelle frontière entre la Belgique et la France, dans les Ardennes belges [cliquer pour agrandir]
A Silenrieux (Slinri, en wallon) vivait au XVIIIème siècle la famille DE FRANCE depuis plusieurs générations, et Maximilien DE FRANCE, mon Sosa n°986 (10 générations) est actuellement mon plus ancien aïeul wallon.
Maximilien, probablement manœuvrier dans la paroisse, avait épousé Marie GILARD à Silenrieux en 1726. Le couple eût sept enfants :
On sait peu de choses de la vie quotidienne de la famille DE FRANCE, sans doute très occupée par les travaux des champs, de la forêt (fabrication du charbon de bois pour les bas-fourneaux du village) ou des mines de marbre.
Anne, la fille aînée de la fratrie dont je descends (Sosa n°493, 9 générations), partira habiter le village voisin de Villers-Deux-Eglises où elle se mariera en 1749 à Charles BASTIN.
Mais le devenir des autres membres de la famille nous interroge. En moins d'un an, on ne compte pas moins de quatre décès :
Pour compléter ce triste inventaire, Marie Catherine meurt à son tour le 17 janvier 1749 à Silenrieux, à l'âge de 13 ans :
Acte de décès de Marie Catherine De France le 17 janvier 1749
"Maria Catherina Defrance, parvola, obiit decima sexta januarii"
Archives royales de Belgique [cliquer pour agrandir]
Sur cet acte, rédigé en latin comme le veut l'usage à l'époque (nous sommes dans le Saint-Empire, et l'édit de Villers-Cotterêts ne s'applique naturellement pas en dehors du royaume de France), on lit parvola, "petite fille" : tout est dit dans ce simple mot latin, le dénuement d'un petit être qui a vu mourir en quelques mois ses deux parents et au moins deux de ses frères et sœurs, et qui meurt à son tour à 13 ans après avoir été recueilli quelques temps.
En cause, sans doute le froid ou la faim, la maladie, le travail des enfants, les mauvais traitements, ou un peu de tout cela.
A partir de 1749, plus aucun acte de la paroisse Sainte Anne de Silenrieux ne mentionnera le nom de la famille DE FRANCE. Dans ce petit village, un infini silence s'est posé sur la mémoire de ces parents et de ces enfants fauchés prématurément par la pauvreté et la dureté de la vie.
Peut-être ce billet sortira-t-il quelque temps de l'oubli ces âmes parties trop tôt. Le mystère de Silenrieux reste entier, même si la proximité de tous ces décès laisse penser à une probable épidémie.
Vue de Villers-Deux-Eglises en Cerfontaine, province de Namur.
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Anne DE FRANCE, l'aînée des enfants, s'est mariée avec Charles BASTIN après cette tragédie familiale. Elle avait 17 ans au décès de son père, 18 ans au décès de sa mère et 22 ans à son mariage.
On ne saura sans doute jamais si elle avait gagné le village de Villers-Deux-Eglises avant ou après cette dramatique époque.
Par chance, ce voyage à Villers, à quelques kilomètres seulement du village natal, permit à Anne de renaître à la vie et de s'assurer une belle descendance.
Sa petite-fille Jeanne BASTIN (ma Sosa 123, à 7 générations), née dans ce village, ne restera pas à Villers et se mariera avec Ambroise CHEVALIER (Sosa n°122) en 1796 à Esquerchin (Département du Nord) près de Douai : c'est de cette union que naîtra plus tard la descendance MASTIN qui quittera finalement l'Artois et Douai pour Brest.
Nous voici de retour en Bretagne !
Jean-Marie Renault
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