Nous voici partis pour un nouveau challenge AZ ! Ceux qui se souviennent du challenge 2023 se rappelleront sans doute que mon envol avait été stoppé net par la tempête dans la nuit du 1er au 2 novembre qui ravagea les installations électriques, m'obligea à l'obscurité durant 9 longues journées et nuits (volets roulants électriques baissés !) et, bien sûr, me conduisit à un silence Internet forcé.
J'avais eu juste le temps d'adresser un post, celui du 1er novembre 2023.
Au lieu de rédiger et d'envoyer les posts suivants, j'avais joué de la tronçonneuse avec quelques voisins pour dégager le chemin d'accès à mon quartier, et attendu le retour de la fée électricité.
Je croise les doigts, en espérant qu'il n'existe pas de lien entre la météo et ma participation au challenge.
Mon challenge 2024 sera donc celui que j'avais prévu en 2023. J'en appelle donc à la bienveillance de mes lecteurs : le premier post de 2024 est donc celui que j'avais proposé en 2023. J'ai, cependant, trouvé quelques illustrations supplémentaires pour 2024, à partir des affaires de mes grands-parents : le Guide Michelin 1937 et la plaque de propriétaire de la Juvaquatre qui ne se trouvaient pas dans le post de 2023.
Les posts suivants, par définition, seront nouveaux puisqu'ils n'ont pas pu être publiés l'an dernier. N'allez pas croire pour autant qu'ils sont en réserve depuis un an : le temps ne m'a pas permis de les écrire tous, loin s'en faut, et mes préparations d'avance sont très modestes… Le mois de novembre 2024 sera studieux !
Bonne lecture !
Jean-Marie Renault
Jusqu'aux années 1950, une minorité de la population possède une automobile. Les familles RENAULT et LE BAILL ne dérogent pas à cette situation et les voitures restent longtemps absentes ou rares dans la famille, ce qui donne à la possession d'une voiture dès 1929 un caractère exceptionnel.
En décembre 1928, mes grands-parents paternels Jean-Baptiste RENAULT et Augustine JEAN décident d'acquérir une automobile.
Cette décision constitue un véritable évènement local, puisqu'il s'agit de la première voiture de la commune de Trémeur (1019 habitants en 1926) [source : AD22, recensement de la population], et la seconde du canton après celle du docteur Cochet, médecin à Broons [source orale : Jean RENAULT]. Il faut croire que ce couple d'instituteurs ruraux a bien géré son budget pour pouvoir s'offrir une voiture à 26 000 Francs.
Leur choix se porte sur le modèle C4 de Citroën, modèle 10 CV 1929, comme en atteste le bon de commande (cliquer pour agrandir) :
La voiture est achetée au garage Lucas de Dinan, à l'époque seule concession Citroën de l'arrondissement de Dinan.
Mes grands-parents paternels n'étant pas portés sur la photo, on ne possède aucune photo familiale du véhicule, mais sa silhouette apparaît sur les publicités de l'époque :
La Citroën est immatriculée 1529 EA, sans lien évident avec le département de résidence. Ca n'est qu'à partir du 1er avril 1950 qu'une réforme fera apparaître les numéros de département, mode d'immatriculation lui-même modifié en 2009 par l'apparition du SIV de type AA-0000-AA.
Pour 670 Fr, le véhicule est assuré auprès de la Compagnie d'assurances du Nord, comme le montre la police signée le 18 décembre 1928 (cliquer pour agrandir) :
Police d'assurance de la Citroën C4 de Jean Baptiste RENAULT
La C4 sera conservée plusieurs années, puis vendue d'occasion à la fin des années 30 alors que se profile dangereusement un conflit qui rendra inutile pour de nombreuses raisons (pénurie d'essence, réquisition,...) la possession d'une voiture particulière.
Mes grands-parents maternels François LE BAILL et Marie MORLAIS vont également céder au charme de l'automobile.
Originaires de Brest, ils s'installent à Paris en 1937 dans le quartier Montparnasse où se concentre alors une population bretonne importante.
En 1938, François LE BAILL décide d'acheter une voiture. Il s'agit alors de gagner un peu en autonomie d'excursions. Dans leur appartement parisien, les promenades à la campagne leur manquent beaucoup.
S'il n'est plus question de se promener sur le Cours Dajot ou le long de la rade de Brest, au moins les environs de Paris offrent-ils de jolis lieux à explorer : bois de Meudon, vallée de Chevreuse, méandres de la Seine, forêt de Sénart...
Les lignes de chemin de fer, et notamment la "ligne de Sceaux" (actuelle branche Sud du RER B) qui s'arrête non loin à la station Port-Royal, constituent des moyens commodes mais limités. Avec une automobile, les dimanches seront plus variés.
La petite famille (père, mère et fille) se documente à l'automne 1937, et ce futur achat retient toute l'attention.
De la documentation que François LE BAILL nous a laissée, il reste trois dépliants publicitaires d'octobre 1937 en excellent état, portant sur les avantages respectifs de la Citroën Traction, de la Rosengart Super5 et de la Renault Juvaquatre.
C'est finalement sur ce dernier modèle que se porte le choix :
Dépliant publicitaire de la Renault Juvaquatre, fin 1937 (Arch. JMR)
Le véhicule est acheté chez Biguet, bd Raspail :
Ma grand-mère Marie MORLAIS, pieuse et pratiquante, se procure pour cette voiture les accessoires religieux qui lui manquaient en série : une plaque de St Christophe pour se protéger du risque d'accident, qui sera vissée sur la planche de bord, et un porte-clés du même saint patron pour ne pas égarer la clé de contact.
Ces accessoires de qualité sont aujourd'hui encore en parfait état :
A ces accessoires s'en ajoute un autre, obligatoire à l'époque : la plaque de propriétaire, fixée dans le véhicule (probablement sur le tableau de bord) :
Plaque de propriétaire de la Juvaquatre, avec nom et adresse.
Acquise au début de l'année 1938, la Juvaquatre permettra à la famille LE BAILL de sillonner les routes de la région parisienne. Prenant confiance en son véhicule, la famille se rend dans le Jura et dans le Doubs pour y rendre visite à une amie ouessantine, receveuse de la poste de Port-Lesney et bien éloignée de son île natale.
Le guide Michelin 1937 de mes grands-parents, ouvert à la page de Port-Lesney (Jura).
Mais, comme pour les grands-parents RENAULT, l'approche de la déclaration de guerre rend difficile l'usage d'un véhicule automobile. L'essence devient plus rare pour les particuliers, et l'autorisation administrative de circuler risque d'être rapidement retirée.
La Juvaquatre est donc revendue, après seulement un an et demi d'utilisation.
Ma grand-mère Marie MORLAIS (1890-1940) devant la Juvaquatre familiale.
J'ai voulu ici montrer, notamment à ceux qui débutent leur généalogie, que l'histoire familiale peut concerner une période proche, celle des tout-premiers ascendants.
A partir de quelques "papiers de famille" et quel qu'en soit le sujet, il est possible d'intégrer des données familiales parfois modestes à la marche de l'Histoire.
Ici se croisent de nombreux thèmes : les sciences et techniques (les progrès de l'automobile), les données sociologiques (l'élévation du niveau de vie qui permet à quelques uns d'acquérir un bien coûteux) et politiques (l'approche de la guerre 39-45 et l'obligation de s'adapter de nouveau à un mode de vie plus modeste et à un quotidien difficile).
Jean-Marie Renault
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Joelle (vendredi, 01 novembre 2024 09:13)
Très intéressant ce message journalier que j'attendrai tout les jours avec impatience
Camille (vendredi, 01 novembre 2024 09:53)
Nous aurons le plaisir de lire cette année les tribulations Renault.
Article intéressant et bien expliqué
Merci
Stéphane (Brèves d'antan) (dimanche, 03 novembre 2024 17:35)
Le Saint-Christophe est encore d'actualité dans la voiture des sosas 6 & 7 �