Une de nos familles wallonnes anéantie en quelques mois

Silenrieux et Villers-Deux-Eglises,

deux villages de la province de Namur (Belgique), entre Sambre et Meuse.

 

Au XVIIIème siècle vivait en Wallonie une branche ascendante de Marie MORLAIS (1890-1940), à 8 générations de Marie LE BAILL ("Mamm-Gozh"), dans les villages de Villers-Deux-Eglises et de Silenrieux.

 

Ces paroisses, devenues communes après la Révolution française et leur annexion par la France, n'existent plus aujourd'hui en tant que telles : elles ont fusionné avec d'autres pour constituer l'entité appelée aujourd'hui Cerfontaine, située en Belgique au pied du massif des Ardennes.

 

A Silenrieux vivait la famille DE FRANCE depuis plusieurs générations, et Maximilien DE FRANCE est notre plus ancien aïeul wallon connu à ce jour. 

 

Maximilien, probablement manœuvrier dans la paroisse, avait épousé Marie GILARD à Silenrieux en 1726. Le couple eût sept enfants : Anne DE FRANCE (née en 1727), Philippe (1728), Marie angélique (1730), Marie Anne (1733), Marie Catherine (1735), Basile (1738) et Marie Thérèse (1741).

 

Début de l'acte de mariage de Maximilien DE FRANCE et de Marie GILARD,

le 26 janvier 1726 à Silenrieux, paroisse Sainte Anne. (cliquer pour agrandir)

L'acte est en latin : la Wallonie n'est pas en France et l'édit de Villers-Cotterêts qui impose l'usage du français dans les actes écrits ne s'applique pas.

 

On sait peu de choses de la vie quotidienne de la famille DE FRANCE, sans doute très occupée par les travaux des champs, de la forêt (fabrication du charbon de bois pour les bas-fourneaux du village) ou des mines de marbre.

 

Anne, la fille aînée de la fratrie, ira habiter le village voisin de Villers-Deux-Eglises où elle se mariera en 1749 à Charles BASTIN.

Sa petite-fille Jeanne BASTIN, née dans ce village, ne restera pas à Villers et se mariera à Esquerchin, près de Douai : c'est de cette union que naîtra plus tard la descendance MASTIN qui quittera finalement l'Artois et Douai pour Brest où aura lieu le mariage avec Charles MORLAIS.

 

Mais c'est ici le devenir des autres membres de la famille qui nous retient : en moins d'un an, on ne compte pas moins de quatre décès à Silenrieux...

 

  • Marie Thérèse meurt le 3 juin 1744, à l'âge de 3 ans
  • le père, Maximilien DE FRANCE, meurt le 10 août 1744
  • Philippe Joseph meurt le 24 septembre 1744, à l'âge de 15 ans
  • la mère, Marie GILARD, leur survit quelques mois et meurt le 5 juin 1745

Pour compléter ce triste inventaire, Marie Catherine meurt à son tour le 17 janvier 1749 à Silenrieux, à l'âge de 13 ans :

 

"Maria Catherina Defrance, parvola, obiit decima sexta januarii"

 

Parvola, "petite fille" : tout est dit dans ce simple mot latin, le dénuement d'un petit être qui a vu mourir en quelques mois ses deux parents et au moins deux de ses frères et sœurs, et qui meurt à son tour à 13 ans après avoir été recueilli quelques temps.

 

En cause, sans doute le froid ou la faim, la maladie, le travail des enfants, les mauvais traitements, ou un peu de tout cela.

 

A partir de 1749, plus aucun acte de la paroisse Sainte Anne de Silenrieux ne mentionnera le nom de la famille DE FRANCE. Dans ce petit village, un infini silence s'est posé sur la mémoire de ces parents et de ces enfants fauchés prématurément par la pauvreté et la dureté de la vie.

 

Peut-être ce billet sortira-t-il quelque temps de l'oubli ces âmes parties trop tôt.

 

Anne DE FRANCE, l'aînée des enfants, s'est mariée après cette tragédie familiale. Elle avait 17 ans au décès de son père, 18 ans au décès de sa mère et 22 ans à son mariage. On ne saura sans doute jamais si elle avait gagné le village de Villers-Deux-Eglises avant ou après cette douloureuse époque.

 

Par chance, ce voyage à Villers, à quelques kilomètres seulement du village natal, permit à Anne de renaître à la vie et de s'assurer une belle descendance.

 

 

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Commentaires: 2
  • #1

    Joelle (lundi, 27 février 2023 10:08)

    J'ai quand même raison de ne pas comprendre le racisme car je pense que tout le monde est sacrément métissé ...même entre blancs ! Plus de généalogie pour calmer les nationalismes extrêmes ?

  • #2

    Jean-Marie (lundi, 27 février 2023 16:40)

    La généalogie nous renvoie à la diversité de nos origines, et donc à celle des temps présents. L'élargissement de l'horizon du temps, en histoire familiale et en généalogie, est une source d'enrichissement permanent.
    La découverte récente et très inattendue d'ancêtres enracinés en Wallonie en est la preuve.
    Et l'on peut se réjouir qu'aujourd'hui, les conditions de vie décrites ici ne fassent plus partie de notre quotidien. Ayons une pensée pour les nombreuses victimes de ces temps durs et méchants.

(c) Jean-Marie Renault, 2008-2024

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