Joseph MORLAIS, né à St-Gilles près de Rennes en 1828, vécut assez misérablement à la ferme natale du Cas-Rouge (voir sa biographie).
A l'instar de son frère aîné Pierre, Joseph décida de s'installer comme boulanger. Alors que Pierre avait choisi Guingamp, c'est à Brest que Joseph posa son balluchon vers l'année 1850.
Peu de temps après son mariage en 1854 avec Joséphine SIOU, jeune fille de Lambézellec originaire du Moulin à Poudre, il s'installa à "Lambé" place de Keruscun, dans une vaste maison bordée par la rue Porstrein Nevez aujourd'hui disparue.
Joseph et Joséphine firent l'acquisition de cette vaste demeure. Jugez plutôt : un rez-de-chaussée avec deux commerces et les arrière-boutiques, des caves où est installé le four, deux étages de quatre chambres chacun, des greniers mansardés, une cour avec cabinet d'aisance, un jardin, une avancée avec hangar donnant rue Porstrein Nevez !
Notre petit fermier de St-Gilles a bien mené son affaire, sans doute au prix de beaucoup de travail mais aussi d'un endettement qu'il devra peu à peu réduire.
Le couple ne reste pas habiter à Lambézellec, et part s'installer 6 rue Guyot, dans un quartier particulièrement mal famé de Brest. Il n'y a pas de place pour une boulangerie, et il est probable que Joseph continua à se rendre chaque matin, très tôt, à son fournil de la place Keruscun.
La famille s'agrandit de 6 enfants, nés rue Guyot ou, plus tard, rue Kéréon. Les revenus familiaux comportent aussi les loyers perçus de la location des habitations de Keruscun. Tout semble aller pour le mieux...
Que se passa-t-il, qui conduisit le tribunal de commerce de Brest à décréter le 3 mai 1873 la faillite de la boulangerie ? On ne saura sans doute jamais pourquoi notre courageux aïeul boulanger ne fit plus face à la nécessité d'équilibrer les comptes de son entreprise.
Le quotidien L'Electeur du Finistère, dans sa rubrique Magasin Pittoresque de son édition du 27 novembre 1873, nous apprend que le 24 juillet de cette même année, le tribunal civil de Brest a ordonné la vente de la "grande maison" de la place Keruscun, en fixant le prix à 15 000 F.
Probablement en raison de difficultés à trouver un acquéreur, le même tribunal civil complète son jugement le 19 novembre et précise "même en-dessous de la mise à prix susréférée".
Un rappel de la vente est fait dans l'édition du 6 décembre, où joseph est qualifié d'ex-boulanger.
En clair, il n'exercera plus la profession pour laquelle il s'est rendu à Brest 20 ans plus tôt.
in L'Electeur du Finistère, 6 décembre 1873
Qu'on se rassure pour notre petit fermier devenu grand, il sût visiblement tirer son épingle du jeu : il acheta une vaste bâtisse d'habitation au 5 rue Duguesclin, où il vécut sans doute paisiblement avec sa femme et ses enfants jusqu'à son décès en 1903.
Que croyez-vous que sa femme Joséphine SIOU fit écrire sur sa tombe ? Petit fermier rennais devenu grand ? boulanger brestois de renom ?
Non, Joséphine résuma bien la vie de son époux en faisant graver :
Ci-gît Joseph MORLAIS
propriétaire
Écrire commentaire
Joelle (mercredi, 22 février 2023 15:41)
C'est quand même une drôle d'épitaphe mais son épouse avait peut-être rêvé de confort avec lui ...